Au moment même où on apprenait que l'ETA (en basque: Euskadi Ta Askatasuna "Pays Basque et Liberté") déposait définitivement les armes et annoncait son auto-dissolution signifiant l'échec TOTAL et SANGLANT d'un régionalisme ethno-linguistique fourvoyé dans l'impasse d'un nationalisme séparatiste, alors que la "crème brûlée catalane" nous démontre que la question régionale en Europe est devenue lancinante au fur et à mesure que les Etats "nations" centraux abandonnent leur souverainetéà l'échelon européen supérieur ou organisent leur propre impuissance face aux logiques libérales et financières de la mondialisation (pensons à cette ineptie de la "concurrence libre et non faussée" sur fond de dumping social et fiscal organisé par certains Etats au sein même de l'Union européenne), il est devenu URGENT de penser l'idée régionale sur des bases rationnelles, utiles, efficaces car la région redevient un cadre pertinent de l'action publique au service de l'intérêt régional, à savoir, un outil pour faire de la "République" ensemble pour non pas détruire une République plus grande qui doit rester "une et indivisible" mais qui permettrait de la refonder dans une démocratie plus forte, plus authentique, selon le vieux principe juridique de la"subsidiarité" des responsabilités: selon ce principe déjà inscrit dans le droit canon de l'église catholique romaine, c'est d'abord aux responsables directs d'un problème que revient la charge d'avoir à le résoudre. Si cela n'est pas possible, une autorité géographiquement et moralement supérieure prend alors le relais. Ainsi, selon ce principe de responsabilité politique, les Etats "nations" centraux peuvent être démocratiquement refondés en devenant, pleinement, des Etats de droitgarantissant de part leur autorité régalienne de dernier ressort la liberté d'agir et d'entreprendre, le "laissez nous faire" d'une société civile adulte et démocratique déjà organisée en associations, collectifs, fédérations ou regroupée autour d'institutions locales et régionales.
Car l'heure n'est plus à la seule dévolution du pouvoir du haut vers le basdepuis une incarnation humaine gouvernant tout l'Univers depuis un point central (La France est toujours gouvernée selon ce principe) mais à la reconnaissance, pleine et entière, de tous les "corps intermédiaires et constitués" de la société civile constituant la chair même de la Nation et qui en permet la souveraineté concrète par la vitalité et la diversité des talents et entreprises qu'on y trouve et dont l'expression ou l'utilité sont protégés par la force publique d'un Etat non pas au service de lui-même mais du DROIT.
Aussi, pour éviter un double écueil, celui du séparatisme régionaliste ou micro-nationaliste, d'un côté, et celui d'un centralisme étatique autoritaire sinon infantilisant de l'autre (chacun étant l'idiotie utile de l'autre), il nous reste à pratiquer, notamment en France, un chemin qui ne l'a pas été suffisamment depuis 1789 et le début de notre modernité politique: l'idée régionale ou "girondine" est une idée neuve... En France donc en Europe.
Pasquale PAOLI
Marie-Charlotte CORDAY D'ARMONT
Aussi nous ne parlerons pas plus ici de l'échec de l'ETA mais plutôt de la visite faite le 3 mai 2018 par le président de la "République des Normands" en Corse qui se souvient d'avoir été dans les années 1760 un laboratoire de la modernité politique européenne sous la double égide de Paoli et de Rousseau:
La Normandie de Charlotte Corday, d'une part, en tant que seule "région-province" de la France continentale qui voudrait remettre au goût du jour les alternatives républicaines girondines et, d'autre part, la Corse de Paoli qui veut, elle aussi, sortir de l'impasse violente séparatiste et nationalitaire, il y a matière à un large terrain d'entente d'autant plus large qu'Emmanuel Macron, président de la 5ème République française jusqu'à la caricature, poursuit l'illusion d'un autre échec: celui du jacobinisme de l'Etat central français.
A lire sur le site de Corse Net Infos:
Hervé Morin : « La Constitution doit reconnaître le droit à la différenciation des collectivités »
Rédigé par Nicole Mari le Jeudi 3 Mai 2018 à 20:26 | Modifié le Jeudi 3 Mai 2018 - 21:06
C’est par l’exploitation agricole Pischedda à Biguglia que le président de Régions de France et président de la Région Normandie, Hervé Morin, accompagné du Directeur général, Gilles Mergy, a débuté, jeudi matin, son déplacement de deux jours en Corse. Accueilli par le président de l’Assemblée, Jean-Guy Talamoni, il s’est, ensuite, entretenu avec le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni à Bastia, avant de rencontrer l’association Praticalingua, et de clore la journée avec les élus municipaux. Cette visite très politique, qui se poursuit jeudi à Ajaccio, s’inscrit dans le bras de fer qui oppose les régions et l’Etat tant au niveau de la réforme constitutionnelle que de la contractualisation des dotations publiques. Elle est, pour l’ex-ministre de la défense, comme pour les responsables nationalistes, l’occasion de réaffirmer, dans un front commun, la nécessité de reconnaître le droit à la différenciation des collectivités. Explications, pour Corse Net Infos, d’Hervé Morin et, en vidéo, de Jean-Guy Talamoni.
Le président Régions de France, Hervé Morin à Bastia entouré du président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, et des présidents des groupes politiques, Hyacinthe Vanni (Femu a Corsica), Petru Anto Tomasi (Corsica Libera) et Jean-Martin Mondoloni (Per l'Avvene).
Pour quelle raison êtes-vous venus en Corse ?
- Je suis venu, d’abord à l’invitation des deux présidents. Ensuite, pour réaffirmer le soutien des régions de France à la démarche de la Collectivité de Corse pour l’obtention d’un statut qui, grosso modo, prend en compte le particularisme, l’identité, la culture et les problématiques liées à l’insularité. En clair, les régions de France désirent que soit reconnu, dans la Constitution, le droit à la différenciation des collectivités avec des pouvoirs différents dans des collectivités qui ont des problématiques et des sujets différents.
- Quelles problématiques par exemple ?
- Par exemple, en Normandie, je suis demandeur pour récupérer l’autorité sur les grands ports maritimes parce que l’Etat n’a jamais eu de politique maritime digne de ce nom ! La Normandie aurait intérêt à ce que la région prenne en main ce sujet. En Corse, il est évident que, compte tenu des éléments que j’indiquais, il y a la nécessité de la reconnaissance d’un pouvoir législatif délégué, d’un pouvoir règlementaire et de compétences particulières. Nous défendons cette position, à la fois, pour les régions continentales, mais aussi, bien entendu avec encore plus d’acuité, pour la Corse.
- N’est-ce pas un vœu pieux qui se heurte à l’ultra-jacobinisme du président Macron ?
- J’ai entendu le discours girondin du Président de la République lors du congrès de l’association des maires de France. J’ai approuvé, mais je constate qu’il y a d’un côté, un discours girondin, de l’autre, une démarche jacobine et centralisatrice qui ne marche pas ! Les pays qui vont bien sont des pays décentralisés ou fédéraux. J’étais en Belgique, hier, au port d’Anvers, le deuxième port le plus grand d’Europe qui est géré par la Collectivité d’Anvers. Quand j’évoquais l’idée de la centralisation de la gestion des grands ports, les élus, là-bas, étaient ahuris ! Centraliser, c’est tout faire pour ne pas créer des conditions d’efficacité ! C’est le cas, malheureusement, de tous nos grands ports maritimes.
- Comment comptez-vous défendre cette position ?
- Je veux faire entendre au Chef de l’Etat que les politiques, menées de façon centralisée sur toute une série de sujets, conduisent à l’échec de la France et des Français. Il y a besoin d’adaptabilité, d’intelligence, de réactivité, d’initiative, d’expérimentation, d’approche différente selon les territoires qui ont des problématiques différentes. Tout cela doit être reconnu dans les textes. Il faut que le Chef de l’Etat sorte de l’idée qu’il pourrait gagner tout seul dans son bureau à l’Elysée avec une centralisation excessive. C’est mauvais pour la France ! C’est source d’échecs et de difficultés alors que des gestions décentralisées marchent très bien. Ceci dit, j’aime l’Etat !
- C’est-à-dire ?
- On peut être girondin et aimer l’Etat ! J’aime l’Etat quand il remplit ses missions là où on l’attend : la défense, la politique étrangère, le régalien économique, le droit du travail par exemple. Là-dessus, je n’ai aucune revendication. Mais je dis que l’Etat doit être à fond là où il doit être et lâcher la grappe aux collectivités sur des sujets que les collectivités traitent beaucoup mieux que les administrations de l’Etat.
- J’aime l’Etat qui nous donne des leçons sur la dépense publique ! Pour que les Corses aient bien en tête les éléments, il faut savoir que, lors des 4 dernières années, sur les 67 milliards € d’augmentation de la dépense publique, 63 milliards € sont liés à l’Etat et aux organismes qui sont sous sa tutelle. Depuis trois ans, les collectivités participent au désendettement de la France quand l’Etat continue de participer à l’endettement de la France. C’est une situation assez ahurissante où l’Etat continue à charger les collectivités et à ne pas réduire la dépense publique, et dit : « Surtout faites ce que je ne fais pas ! ». L’Etat ne peut pas continuer à faire la leçon à des collectivités qui ont besoin de mener des politiques sur des sujets extrêmement importants. Ces politiques, on ne pourrait pas les mener dans le cadre de ces contrats.
- De quelles politiques s’agit-il exactement ?
- Prenons un exemple. La plupart des régions sont confrontées à un vrai problème concernant les compétences et les qualifications professionnelles, ceci dans le cadre de l’économie nationale qui fait face à des goulets d’étranglements considérables générés par l’absence de main d’œuvre. On ne trouve ni les compétences, ni les qualifications, ni la main d’œuvre ! On a, donc, besoin de faire des efforts gigantesques en termes de formation professionnelle et de retour à l’emploi. Il faut, pour cela, dépenser ! Oui, il faut gérer sérieusement, oui il faut faire des économies, nous en faisons tous ! Mais, il faut aussi que nous soyons en capacité de dépenser plus là où il y a des besoins urgents et évidents, comme sur la formation professionnelle.
- Y-a-t-il une révolte des régions contre ce retour au centralisme ?
- Il y a une révolte de toutes les collectivités : communes, départements et régions. Quand avec Dominique Bussereau et François Baroin, nous avons fait cette conférence de presse sur notre refus de contractualiser, nous avons dit que nous n’étions pas dans une démarche politicienne. Nous ne sommes pas dans une démarche partisane, nous sommes plutôt bienveillants à l’égard de l’Exécutif, mais, en retour, l’Exécutif ne nous calcule pas et n’est pas loin du mépris. C’est ahurissant !
- Des élus ruraux évoquent plutôt l’ignorance de l’Exécutif national, sa grande méconnaissance des territoires. Etes-vous de cet avis ?
- Je pense qu’en effet, le Chef de l’Etat a un vrai problème avec les territoires ! Il ne sait pas ce que c’est ! Il va soi-disant dans le monde rural en Normandie, en vérité il met un studio de télé dans une école rurale, mais il ne va pas voir le monde rural ! Il fait une heure d’émission de télé en zone rurale, il ne dit pas un mot pour l’agriculture et le monde rural ! Un studio télé, ça ne suffit pas pour dire qu’il s’adresse au monde rural ! Il ne suffit pas de déplacer la moitié d’un gouvernement pour dire que, tout d’un coup, on s’occupe du monde rural ! J’ai envie de dire au Chef de l’Etat que les métropoles existent, mais il n’y a pas que les métropoles !
- Oui ! J’ai toujours dit que les spécificités, la culture, l’identité et l’histoire corses fondent la nécessité d’un statut particulier pour la Corse. Cela ne fait absolument aucun doute !
- Avez-vous une stratégie pour faire plier le gouvernement ?
- Nous allons très clairement passer à des opérations où nous nous associerons aux départements et communes pour faire entendre à l’Etat que les territoires demandent àêtre respectés.
- Pourquoi avez-vous rencontré l’association Praticalingua ? Quelle est votre position sur les langues régionales ?
- Cette question de la langue m’intéresse, mais je ne sais pas trop comment l’aborder. Je suis d’autant plus intéressé que je pense que cette question n’est pas du tout contradictoire avec l’apprentissage du français. J’ai aussi une langue à défendre : le normand. J’avais envie de voir ce que fait cette association pour appréhender comment relancer l’apprentissage de ma langue dans ma région. On peut offrir au moins à nos compatriotes la capacité de cultiver leurs racines et, à travers elles, la fierté d’appartenir à une région. En Corse, il n’y a pas de débat sur ce sujet-là, il y en a plus en France continentale.
- Le budget de l’Europe va baisser de 1%. Ne craigniez-vous pas que les régions en fassent les frais ?
- J’étais, hier, à Bruxelles pour leur dire que la politique de cohésion, c’est-à-dire les crédits FEDER et FEADER, était absolument indispensable. On ne peut pas accepter une Europe qui ne s’attelle pas, par des crédits, à redresser de grandes disparités de compétitivité et de performance économiques entre les régions. Dans l’Europe, il y a des régions prospères qui tournent, comme l’île de France ou la Normandie, et des régions qui souffrent. Il faut une solidarité européenne. La France doit continuer à bénéficier de crédits de cohésion suffisamment significatifs. J’ai également dit que ces crédits de cohésion doivent être conditionnés à un certain nombre de respect des règles notamment démocratiques. On ne peut pas considérer qu’on a droit à l’argent de l’Europe sans respecter les valeurs de l’Europe !
- Que pensez-vous du recul sur la PAC (Politique agricole commune) qui affectera les agriculteurs français ?
- J’entends la nécessité pour l’Europe de trouver 15 milliards € d’économies, compte tenu du départ des Anglais, mais j’entends, aussi, le fait qu’il faut savoir augmenter le budget européen afin que l’agriculture, qui est un trésor vert absolument gigantesque sur le long terme, ne soit pas remise en cause.
Propos recueillis par Nicole MARI.