Quelle idée saugrenue!
Composer un hymne normand... Il en avait été question un peu rapidement, trop peut-être, lors de la soirée de lancement de la Mission Attractivité Normandie le 29 septembre dernier à Rouen. Alors que certains dans le public présent (ainsi que votre serviteur) commençaient à fredonner ou à chanter la célèbre chanson du rouennais Frédéric Bérat "J'irai revoir ma Normandie", Laurence Equilbey, la célèbre directrice de choeur en résidence à l'opéra régional de Rouen prenait le micro pour annoncer qu'elle était disposée àécrire un nouvel hymne pour la Normandie, musique et paroles.
Voilà qui nous parait quelque peu présomptueux faute de faire un peu plus attention aux paroles et à la qualité musicale de l'hymne de Bérat, une chanson patrimoniale française connue dans le monde entier dès sa création en 1836 au point qu'elle fut surnommée "la Marseillaise des sentiments" et qu'elle fut parmi les toutes premières oeuvres àêtre enregistrées auprès de la SACEM dès sa création en 1852.
- Lire ci-après l'article de Paris-Normandie:
Un hymne pour la Normandie, une bonne idée ?
Droit de suite. L’idée de créer un « refrain rythmique » qui fédérerait les Normands prend corps auprès des artistes et des institutionnels. Reste à trouver la composition qui fera mouche.
Le refrain est connu : le chant transcende les clivages, réunit au-delà des différences. «C’est un moment de communion incroyable», confirme Jacques Chevalier, directeur général de la Chambre d’agriculture de Normandie.
Ce Normand d’adoption depuis trente ans a donné de la voix il y a une quinzaine de jours (lire ci-contre) lors du lancement de la MAN (Mission Attractivité Normandie). Il se fait l’écho du souhait de nombreux Normands, dit-il. Contacté cette semaine, ce Bourguignon d’origine, musicien d’une famille de paysans qui poussaient la chansonnette, avoue être «jaloux du brass band du sud-ouest, des musiques bretonnes, des polyphonies corses», lorsqu’il se rend au Salon de l’agriculture àParis.
Et pourquoi pas une seule note de la Normandie ? «Qu’est-ce qu’on a nous les Normands?»Il y a bien J’irai revoir ma Normandie, mélodie du souvenir avec des paroles peu adaptées pour mettre le feu... «Je la trouve pas trop agressive, mais si on arrive à trouver quelque chose qui donne une identité culturelle visible, allons-y!», s’enthousiasme Emmanuel Mauger, président de l’association du Mouvement normand. Rien de tel qu’un puissant hymne donc pour partager un patrimoine commun
et en porter les valeurs. «L’idée est vraiment intéressante», confirme Laurence Equilbey, la célèbre chef d’orchestre et fondatrice du chœur Accentus. Cette habitante de la baie du Mont-Saint-Michel avait rebondi sur la proposition de Jacques Chevalier et poursuit sa réflexion, sans être candidate à une quelconque composition. «Je veux bien aider, donner des idées, proposer. Pourquoi ne pas lancer une enquête ou même initier un référendum pour savoir ce que la population voudrait ? », s’aventure, il y a trois jours, l’artiste, qui affiche la conviction que «ce refrain rythmique doit donner la chair de poule et en plus véhiculer nos valeurs.»
Vaste challenge qui n’entre pas encore dans une mission déterminée. Hervé Morin (UDI), le patron de la Région semblerait être favorable. Ses services disent que la MAN doit d’abord se mettre en route.
Aucune note dissonante donc pour l’instant. Institutionnels, fous de chants, artistes semblent se rassembler autour de ce projet hyperfédérateur. Reste à trouver comment. Michel Onfray propose les services de son Université populaire de Caen pour s’orienter vers «un travail de colletage du folklore normand.»
«En tout cas, c’est un vrai métier», souligne Yvon Davy, directeur de la Loure, association du Calvados qui collecte et sauvegarde les chansons anciennes de Normandie. À ce titre, il rappelle que dans «le Cotentin et le pays de Caux, on chanterait plus qu’ailleurs...» Et oui, les Normands aiment se retrouver autour des chants. Il y en aurait d’ailleurs des milliers, des traditionnels ancrés dans le patrimoine régional.
La vraie question, c’est comment imaginer un hymne reconnu par les Normands ? Peut-il être décrété, institutionnalisé, voire imposé ? La Bourgogne se retrouve autour du fameux « ban bourguignon », parce que les étudiants ont impulsé un élan festif. La Bretagne partage des musiques traditionnelles. Le Nord- Pas de-Calais a bien tenté de sortir des P’tit quinquin, «Corons et autres Quand la mer monte pour changer l’image de la région et lutter contre les clichés. Une association à vocation économique et un compositeur ont sorti en 2015 400 jours par an une « chanson-hymne »à base de clichés détournés (« Perds pas l’Nord, quoi qu’il advienne/Même si parfois le ciel fait des siennes »). Les Nordistes ont cru à un gag et ont déjà oublié la tentative...
«C’est un bon exercice aussi bien pour le texte que pour les paroles, qui doivent avoir du sens et concerner la population avec un fort pouvoir évocateur», admet Patrick Bacot, musicien et directeur du conservatoire Honegger duHavre, intéressé si une équipe se constitue. Les bonnes volontés qui se retrouveront autour de ce joyeux projet auront l’ambition de trouver un ensemble musical qui «ne soit pas daté, parle à toutes les générations, quelque chose d’intemporel.» Jacques Chevalier pense qu’il faut «porter nos racines, nos victoires et nos combats. Un hymne à la liberté et à la paix en quelque sorte.» Patrick Bacot le compare à un «bon outil de com, bien ficelé, cri de ralliement.» Laurence Equilbey va plus loin en citant l’hymne du Stade Malherbe Caen écrit par l’artiste Fred Zahmal en 2010 pour en renforcer l’identité. Dans l’enceinte sportive, on chante:
« Nous sommes normands, fiers et conquérants»....
L’idée de l’hymne normand ressemble bien à une belle histoire à mettre aujourd’hui en musique. À l’unisson.
Patricia Lionnet
Le contexte
Commentaire de Florestan: