Et tous les Normands devraient en être fiers alors que la barbarie qu'elle soit celle de l'hyper-consummérisme individualiste ou celle d'un fanatisme religieux d'un autre âge revient pour donner une triste couleur à notre époque.
Nous allons vous reparler de la "Maison Sublime" de Rouen, un bâtiment daté du tout début du XIIe siècle situé sous la cour de l'ancien parlement de Normandie et palais de Justice de Rouen et qui a été retrouvé en 1976 à la suite de travaux de réfection dans la cour.
Ce monument médiéval normand qui serait peut-être la plus ancienne synagogue d'Europe occidentale témoigne, une fois de plus, de l'esprit d'ouverture et de tolérance des anciens ducs de Normandie et, plus largement, des valeurs pratiques mises en oeuvre à l'époque dans le cadre du droit normand.
La protection de la personne privée pouvait aussi s'étendre à la protection de ses convictions religieuses dans le cadre de la clameur de Haro.
Au XIIe siècle, le monde normand était donc un monde des libertés: pas de servage en Normandie, pas d'antisémitisme non plus alors qu'il va se développer au cours du XIIIe siècle en France, esprit de croisade aidant...
Lire par exemple, cet extrait du commentaire de la grande coutume de Normandie d'Amable Floquet (XVIIIe siècle) qui signale la façon dont des témoins d'un meurtre d'un juif commis à Bernay en 1220 ont été condamnés par les juges de l'Echiquier pour avoir sciemment ignoré la clameur de haro:
Lire l'article de Paris-Normandie ci-dessous: une souscription publique vient d'être ouverte à l'initiative heureuse de Jacques Sylvain Klein pour permettre une restauration définitive et une mise en valeur muséographique des lieux. Tous les vrais Normands devraient souscrire ne serait-ce pour rendre hommage à l'ancienne libéralité de notre coutume juridique et à celle de nos anciens ducs.
On rappelera aussi que c'est Guillaume Le Conquérant qui autorisa la création de la communauté juive de Londres...
Rencontre avec Serge Brard, l’homme qui a découvert le Monument juif de Rouen en 1976
Témoin. Alors qu’une souscription nationale est lancée pour rénover le Monument juif, découvert en 1976, à l’occasion de travaux au palais de Justice, Serge Brard tient à rappeler les circonstances de sa découverte
Chaque fois qu’un historien ou un journaliste évoque le Monument aux juifs de Rouen, il attribue sa découverte à«une pelleteuse déstabilisée dans la cour du palais de Justice de Rouen». C’est encore le cas ce mardi 14 juin, alors que la Fondation du patrimoine et l’association La Maison Sublime de Rouen (LMSR) lancent en grande pompe une souscription nationale pour soutenir la rénovation de ce vestige roman, daté du XIIe siècle. La pelleteuse pourtant n’est pas pour grand-chose dans cette découverte. Détail pour les historiens et journalistes mais clef de l’histoire pour Serge Brard. Car, lui, tient à préciser qu’il se trouvait à la manœuvre ce jour d’août 1976 et que «jamais l’engin n’a été déstabilisé». Aujourd’hui âgé de 76 ans, retiré en Ardèche, il se souvient comme hier de cette journée d’été et de sa découverte qui doit moins au hasard qu’il n’y paraît.
Des traces dansla cour...
Serge Brard, à l’époque, dirige la GAE une entreprise de terrassement et démolition, à Anceaumeville. «Je travaillais en sous-traitance pour l’entreprise Lanfry. La ville de Rouen voulait remettre en service le passage reliant les rues aux Juifs et Saint-Lô. Il s’agissait de refaire la cour du palais qui était bitumée et réservée au stationnement des avocats et magistrats», raconte Serge Brard. Sa mission est de retirer ce bitume : «Dès les premiers coups de pelles, j’ai découvert des galets, les mêmes que Georges Duval, architecte en chef des monuments historiques nous avait montrés sur une maquette.» Serge Brard n’a pas encore trouvé le monument mais cette première trouvaille étonne déjà. Quelques jours plus tard, a priori le 11 août, prenant de la hauteur sur son engin, il devine des marques au sol qui pourraient être celles de murs. Il signale sa découverte qui se confirme avec l’apparition d’une ouverture. «Avec le chef de chantier, Raymond Bosquain, on a commencéà jeter un œil avec une pile électrique», raconte Serge Brard. Tailleur de pierre, Raymond Bosquain devine l’importance de la découverte qui s’avère une cave médiévale. Très vite, Georges Duval est prévenu. «C’est là qu’il me demande de faire des sondages, à l’angle Est de la cour. Le premier ne donne rien».
Mais il s’entête et tournant de quelques degrés sa pelleteuse vers l’ouest, il sort une pierre de 30 à 40 kg. «C’était le haut d’une colonnade qui d’ailleurs manque toujours au monument», soutient-il.
Les fouilles qui débutent alors vont faire émerger les vestiges romans de la Maison Sublime. «J’ai eu la chance qu’on me demande d’évider le monument», témoigne l’homme de l’art plus qu’investi dans sa mission. Centimètre par centimètre, il creuse, et trouve des boulins* du Moyen Âge. De surprises en découvertes, les archéologues lui demandent de poursuivre jusqu’à moins 4 mètres pour arriver aux fondations. «Je suis resté un mois sur place», raconte non sans fierté Serge Brard. Il stocke les gravats pour permettre aux archéologues de les fouiller et met à leur disposition la secrétaire de son entreprise.
Parti de Normandie en 1978 puis en Afrique de 1981, Serge Brard ne pense plus vraiment à la Maison Sublime et puis... «l’on m’a remis la médaille de la Ville de Rouen en 2011 et l’Académie des sciences et belles lettres, m’a inscrit comme «l’inventeur» de cette découverte», veut faire entendre Serge Brard. Pour que personne n’oublie que la pelleteuse n’est pour rien dans la mise au jour du Monument juif, déclaré le plus ancien d’Europe.
P. B.
p.bertrand@presse-normande.com
Prochaines places disponibles pour des visites de la Maison sublime les mardis 9, 16, 23 et 30août de 15 h à 17h et le vendredi 26août, de 10h30 à 12h. Entrée: 7€. Réservations: 0232083240.
* Un boulin est une pièce d’échafaudage en bois.
Le 14 juin dernier, la Fondation du patrimoine lançait une souscription nationale afin de soutenir la rénovation du monument, initiée par l’association La Maison Sublime de Rouen (LMSR). Créée en 2007, cette association œuvre pour la sauvegarde du monument mais aussi pour sa réouverture au public, prévue après dix-huit mois d’un chantier qui débute en octobre prochain. Le montant des travaux s’élève à 780 000 €, sachant que l’État apporte 360 000 € et les collectivités locales 160 000 € auxquels s’ajoutent 25 000 € du Crédit Agricole et 65 000 € de la Fondation pour la mémoire de la Shoah. Comptant sur d’autres soutiens, l’association espère de la souscription un minimum de 50 000 €.
Le 21 juillet elle dépassait les 33 000 €, sachant que les dons sont possibles jusqu’au printemps 2017, et la fin des travaux.
Une fois la Maison Sublime rénovée, l’objectif pour la LMSR est de faire inscrire ce monument au patrimoine mondial de l’Unesco.